Communiqué de la plateforme énergie-environnement.ch
Trop de pesticides dans les jardins
Bien souvent, l'amateur ignore que les produits qu'il utilise pour entretenir sa pelouse, désherber ses bordures ou nettoyer ses dalles et son toit contiennent des pesticides. Et une trop grande part de ce qui est versé dans les jardins et autour des villas et des immeubles va directement dans la nature. Or, les scientifiques constatent une augmentation inquiétante de nombreuses substances chimiques dans les lacs et les nappes phréatiques, d'où provient notre eau potable.
En Suisse, plus de 320 substances pesticides sont autorisées à la vente et environ 1300 tonnes sont épandues dans le pays chaque année. Si l’agriculture en consomme la grande majorité, les parcs publics, les jardins privés et les gazons des terrains de sport en reçoivent environ un dixième.
L’Ordonnance fédérale sur la protection des eaux fixe à 0,1 microgramme par litre leur concentration maximale dans les eaux souterraines, où l'on puise 80% de l’eau potable consommée en Suisse. Or, cette limite est souvent dépassée non seulement dans les petits et moyens cours d’eau, mais également dans certaines nappes phréatiques. C'est le cas dans un dixième des 590 stations de mesure, selon les derniers résultats de l’Observatoire national des eaux souterraines (NAQUA), publiés par l'Office fédéral de l'environnement en mars 2009. Dans presque la moitié des lieux, on décèle des traces de pesticides ou de leurs produits de dégradation.
Pesticides = tueurs
Pour entretenir le gazon, les rosiers, les dalles ou encore les toitures, on a trop souvent tendance à faire un usage immodéré de pesticides, des substances chimiques conçues pour tuer des êtres vivants qui nuisent aux cultures: herbicides (contre certaines familles de plantes et contre la mousse), insecticides (contre les insectes et leurs larves), fongicides (contre les champignons et les moisissures), molluscicides (contre les limaces et les escargots), acaricides (contres les acariens et les araignées)... Une partie de ces produits s’infiltrent dans le sol dont ils réduisent la fertilité, tandis qu’une autre est lessivée par l’eau de pluie et l’arrosage: ils suivent les bordures des chemins et se faufilent dans les grilles d'égout. Or, de plus en plus de réseaux d’épuration sont conçus en "séparatif": ils sont dédoublés pour éviter d'amener les «eaux claires», provenant de la pluie et du drainage des terrains, vers les stations d'épuration. Les pesticides sont donc entraînés directement dans la nature, idéalement dans un terrain qui les filtre avant l'arrivée dans un cours d'eau, mais trop souvent directement dans une rivière ou un lac.
C'est justement pour cette raison que, depuis 2001 en Suisse, les propriétaires privés ont l'interdiction d'utiliser des herbicides (désherbants) sur les routes d'accès, les chemins, les terrasses, les places de parking - qu'ils soient ou non recouverts de goudron, de dalles, de pavés ou de gravier. Les bordures en herbe ou en terre sont aussi concernées. Cette interdiction ne concerne pas les chemins posés sur la couche d'humus, comme par exemple, les dalles disposées directement sur la terre du jardin. Dans ce cas, s’ils sont utilisés en petites quantités, les herbicides sont dégradés en bonne partie dans le sol.
Il est également interdit de traiter le toit de sa maison ou de son garage avec des herbicides ou des produits antimousse, voire des mélanges d’eau de Javel et de soude caustique. Car, de la gouttière à la nature, le chemin est très souvent direct. L'eau de Javel mélangée avec de la soude caustique – dont l'usage sur un toit est strictement interdit – peut faire des dégâts terribles sur les poissons et la faune des rivières: elle génère de surcroît des produits toxiques qui s’accumulent le long de la chaîne alimentaire et qui peuvent donc un jour réapparaître dans nos assiettes. Un nettoyeur haute-pression qui n'utilise que de l'eau peut faire le même travail (en faisant bien attention de gicler le toit de haut en bas!).
Engrais sélectifs = herbicides déguisés
La mode de la pelouse très courte et uniforme a démarré aux USA dans les années 1950, en même temps que s'est répandu l'usage des petites tondeuses à moteur et des produits phytosanitaires. C'est une monoculture de quelques variétés de plantes herbacées seulement, très pauvre en biodiversité et qui exige non seulement beaucoup d’arrosage et d’engrais synthétiques, mais aussi des pesticides, en particulier des désherbants sélectifs et des produits antimousse. Bien souvent, l'amateur ignore qu'il étend des pesticides sur sa pelouse, car ils sont combinés avec des engrais et vendus sous les noms d'«engrais sélectifs» ou d'«engrais antimousse». Ces produits sont interdits à la vente en Suisse, mais disponibles en France.
Etant donné leur pouvoir de détruire des êtres vivants, les pesticides ne sont pas des produits anodins: on s’expose à des risques lorsqu’on les prépare et qu'on les pulvérise: il faut lire le mode d'emploi, respecter les doses et porter des gants et des lunettes pour éviter le contact avec la peau. Il est aussi essentiel de ne pas vider les restes de produits phytosanitaires dans les grilles d'égout, ni dans les WC, ni dans l'évier. Il faut les ramener dans un centre de collecte où l'on reprend les déchets spéciaux ou sur le lieu de vente. De même, l'eau de lavage du pulvérisateur ne doit pas aller à l'égout, mais être versée sur de la terre déjà traitée, à un endroit où il n'y a pas de risque de ruissellement vers un point de collecte des eaux. Il faut savoir que ces substances contribuent aussi à polluer le domicile, car elles sont ramenées à l’intérieur par les chaussures, ainsi que par les chiens et les chats. De surcroît, les traitements préventifs des plantes avec des insecticides empêchent toute régulation naturelle de s’installer puisqu'ils tuent sans discernement les parasites et leurs prédateurs, telles les larves de coccinelles, dévoreuses de pucerons. Lorsqu'on choisit des rosiers ou des arbres fruitiers, on gagnera toujours à se renseigner sur leurs résistances naturelles aux parasites et aux maladies.
Apprendre à aimer les "mauvaises" herbes
L'usage des pesticides dans un jardin est souvent lié à l'idée qu'il faut se débarrasser à tout prix des "mauvaises" herbes. Or, beaucoup de ces plantes indésirables sont plutôt comestibles (pissenlit, plantain, primevère, violette, cardamine). Elles constituent une richesse de biodiversité et permettent notamment la survie des oiseaux et des papillons. On gagnera à apprendre à les connaître en investissant dans un bon guide des plantes du pays, plutôt que dans des produits phytosanitaires.
Pour de plus amples informations: energie-environnement.ch
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